Il n’y a pas de devoir de réserve du fonctionnaire !

Mais seulement intimidation hiérarchique
vendredi 4 février 2011
par  Sud Education Lorraine

Un article à lire dans le bulletin n°6 de SUD Education Lorraine.

Le soi-disant « devoir de réserve » des fonctionnaires est de plus en plus brandi par la hiérarchie de l’Éducation Nationale : soit par des chefs d’établissements ou des inspecteurs comme prétexte les dispensant de se prononcer sur les régressions sociales que leurs supérieurs hiérarchiques leur demandent de mettre en œuvre sur le terrain, soit par l’administration pour réprimer ou intimider tout agent qui s’exprimerait publiquement sans que cela plaise à la hiérarchie.

Naturellement, dans le cadre de l’exercice de ses fonctions, c’est-à-dire en classe, un enseignant se doit de respecter le principe de laïcité et de neutralité du service public d’éducation. Mais sorti du strict cadre de la classe, un enseignant est libre d’exprimer ses opinions politiques ou philosophiques. Le seul texte de référence, la Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dite Loi Le Pors, ne fait mention nulle part d’un quelconque devoir ou obligation de réserve et garantit, au contraire, la liberté d’opinion et son corollaire la liberté d’expression.

Ce texte dit clairement à l’article 6 que :
- « La liberté d’opinion est garantie aux fonctionnaires,
- Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses, de leur origine, de leur orientation sexuelle, de leur âge, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur apparence physique, de leur handicap ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race.
- Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l’affectation et la mutation ne peut être prise à l’égard d’un fonctionnaire en prenant en considération le fait qu’il a subi ou refusé de subir des agissements contraires aux principes énoncés [dans cet article], le fait qu’il a formulé un recours auprès d’un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire respecter ces principes, ou bien le fait qu’il a témoigné d’agissements contraires à ces principes ou qu’il les a relatés. »

En revanche, « Est passible d’une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus ». Ceci signifie qu’aucune mesure ne pourrait être prise à l’encontre d’un fonctionnaire qui aurait exprimé ses opinions politiques, syndicales ou philosophiques. Mais toute intimidation ou sanction à son égard de la part de la hiérarchie doit pouvoir faire l’objet d’un recours en justice.

Seul un devoir de discrétion est attendu par jurisprudence et apprécié selon l’échelon hiérarchique des fonctionnaires d’autorité (proviseurs, inspecteurs), mais pas des enseignants et directeurs d’école. Et même pour les fonctionnaires d’autorité, il ne s’agit pas d’une obligation statutaire.
L’administration faisant de moins en moins cas de cette garantie constitutionnelle et fondamentale, et intimidant de plus en plus les personnels via inspecteurs et proviseurs, il est conseillé aux collègues de rester prudents s’ils sont isolés, mais de ne se retenir en aucun cas dans les interventions ou actions collectives.

Les droits constitutionnels et syndicaux ne s’usent que si l’on ne s’en sert pas !