L’école subordonnée aux besoins des entreprises : « la formation professionnelle tout au long de la vie »

lundi 24 décembre 2012
par  Sud Education Lorraine

Cette formule appliquée au monde de l’éducation et reprise dans le projet de loi d’orientation, indique clairement que seuls des objectifs d’employabilité sont essentiels. Les autres paramètres (culturels, sociologiques, émancipateurs…) qui fondent une éducation sont devenus secondaires ou n’ont plus d’existence.

Dans les collèges et les lycées : Le tri avant l’insertion professionnelle

Depuis le début des années 2000 de nombreux dispositifs, dès le collège, visent à adapter les flux d’élèves au marché de l’emploi et aux besoins des entreprises : "Parcours de Découverte des Métiers et des Formations" (PDMF), dispositifs de pré-apprentissage, 3e de découverte professionnelle ou prépa-pro, actions de visite d’entreprise, conventions de partenariat entre entreprises ou organisations patronales et des organismes scolaires... A force de lobbying, le patronat a obtenu que ses attentes pénètrent jusqu’aux contenus pédagogiques et méthodes d’enseignement : évaluation par compétences (LPC), critique des programmes et manuels de sciences économiques, obtention d’un enseignement de l’économie d’entreprise, traitement de la difficulté scolaire par des stages en entreprises, stages obligatoires en classe de troisième et possibles dès la quatrième...
Mais aujourd’hui, il semble qu’un pas de plus ait été franchi, tant le ministre Peillon fait de cette préoccupation son cheval de bataille en multipliant les déclarations  : il faut « renforcer le lien entre l’école et l’entreprise », « faire découvrir l’entreprise et les métiers dès la sixième », établir « un lien nouveau (...) entre le redressement éducatif et le redressement productif », créer un « conseil éducation-économie », faire en sorte que « les chefs d’entreprise soient représentés à l’éducation nationale », « mettre en adéquation l’offre de formation avec les besoins des entreprises ». On ne saurait être plus clair...


La voie professionnelle : une évolution symptomatique

Le baccalauréat professionnel est défini comme un diplôme devant prioritairement déboucher sur « l’insertion sur le marché du travail ». Ce n’était pas la philosophie lors de sa création qui devait permettre à 80% d’une classe d’âge d’atteindre le Bac et de prétendre à une poursuite d’études. Puis, la réforme du Bac Pro en 3 ans a été pensée en réduisant de 1000 heures la formation et en augmentant les périodes de stages en entreprise qui devraient atteindre 24 semaines soit 6 mois sur 3 ans dans le projet Peillon ! Les 500 h d’enseignement général perdues ne sont nullement compensées… Aucune exigence de formation de qualité n’est demandée aux entreprises et un coefficient élevé à l’examen leur donne la main mise sur la réussite de l’élève. L’élève stagiaire doit s’intégrer rapidement, exécuter, obéir… sans regard critique, pour valider son diplôme. Des entreprises fonctionnent avec un roulement de stagiaires servant de variable d’ajustement. La rentabilité est le critère d’évaluation qui permet à l’employeur de considérer que la formation est assurée ! Il faut être professionnel avant même d’avoir fini une formation.

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Décrochage scolaire et orientation : l’entreprise, « remède à spectre large »

Depuis 20 ans, l’entreprise s’impose comme remède aux insuffisances du système éducatif :

  • avec les stages en entreprise obligatoires en 3ème qui mettent l’accent sur le « projet professionnel » de l’élève, mais combien d’entre eux échapperont pourtant à la reproduction sociale ?
  • projets de micro-entreprise, PDMF, Forums des métiers... : autant de manières de banaliser la présence de l’entreprise privée à l’école, sous divers prétextes éducatifs et pédagogiques ;
  • pour les « décrocheurs », dès le collège : stages en entreprise, pré-apprentissage, puis alternance ;
  • dans la professionnalisation des études : jusque dans les années 80, les études professionnalisées permettaient à des jeunes de s’insérer dans un domaine professionnel ; à charge des entreprises de former au poste de travail. Depuis, apparaissent dans les lycées et dans le supérieur, des formations dont la finalité est de former au poste de travail. Parfaits exemples de cette dérive : la partie terminale des Bacs Pro dont une partie croissante est confiée aux entreprises, ou les BTS et DUT commerciaux qui spécialisent dans la vente de produits bancaires, d’assurance ou pour la grande distribution ;
  • par l’intervention des entreprises dès la 6ème, revendiquée aujourd’hui par Peillon, manière d’introduire un peu plus la logique entrepreneuriale dès le collège ;
  • pour les enseignants aussi  : alors que leur formation continue se réduit, se fait hors temps de service ou à distance, la mission école-entreprise nous forme (formate ?) à la réalité du monde de l’entreprise.
  • Le plus inquiétant, c’est que cette présence de l’entreprise dans l’école est vécue comme évidence indiscutable par une part croissante du monde de l’éducation. La lutte se doit donc aussi d’être idéologique !

Page 3 du 4 pages spécial école-entreprise


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