Ce gouvernement : une véritable machine à remonter le temps.

Edito développé du bulletin d’informations syndicales SUD Education Lorraine n°23 - Avril 2016 p. 1
vendredi 13 mai 2016
par  Sud Education Lorraine

Ce gouvernement : une véritable machine à remonter le temps.

Que ce soit à propos de la loi travail (Loi El Khomri), des lois Macron ou Rebsamenn, de la loi sur la future convention UNEDIC, ou encore sur l’état d’urgence ou la déchéance de nationalité, sur le nucléaire ou les grands projets inutiles (Sivens, Notre Dame des Landes…), ou sur la criminalisation du mouvement social ou syndical (Air France, Goodyear, Yann Le Merrer à la poste.. .), le constat est identique : une régression sociale de parfois plusieurs décennies.

L’état d’urgence instauré sur l’ensemble du territoire nous ramène à la guerre d’Algérie. La déchéance de la nationalité prévue par le gouvernement ressemble fort à un texte issu du régime de Vichy : la seule fois où la France a dénaturalisé des Français, c’était par loi du 22 juillet 1940, sous Vichy, pendant l’Occupation - juste avant de voter une loi sur le statut des juifs.

Les grands projets inutiles ont été conçus il y a des dizaines d’années : le projet d’aéroport du Grand Ouest, appelé souvent projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes date de 1963. Le projet du barrage de Sivens date, lui, de 1969. La politique du tout nucléaire date de 1974. Alors que la plupart des pays désinvestissent cette énergie pour des raisons financières et de sécurité, la France continue à investir aveuglément (EPR) et recule sans cesse la fermeture des vieilles centrales.

Le 13 janvier 2015, Yann Le Merrer, quarante-trois ans, fonctionnaire et secrétaire départemental adjoint SUD PTT des Hauts-de-Seine, s’est vu notifier chez lui par huissier sa révocation par La Poste pour faits de grève. Du jamais-vu depuis 1951. Le 12 octobre 2016, 5 salariés d’Air France sont interpelés à l’aube et devant leurs familles soupçonnés d’avoir déchiré la chemise d’un dirigeant de leur entreprise. Le 12 janvier 2016, ce sont huit anciens salariés de l’usine Goodyear qui ont été condamnés à 24 mois de prison, dont 9 fermes, pour « séquestration » lors de la mobilisation contre la fermeture de leur usine. Cette répression contre l’action syndicale n’a pas été égalée, en métropole, depuis le début de la cinquième République.

Que dire alors du projet de loi travail qui consiste en un véritable retour au droit d’avant 1910 avec la naissance du code du travail ? Avant 1910 : le contrat de travail était un contrat de droit commercial, négocié individuellement par un salarié face à un employeur : le pot de fer contre le pot de terre. Ce droit dissocie les droits des salariés des intérêts de l’entreprise. Le droit du travail n’a qu’une seule fonction : protéger les salariés. Ce droit reconnaît l’existence d’un lien de subordination entre le salarié et son employeur. La contrepartie de ce lien de subordination est la création d’un droit protecteur, le droit du travail. Désormais, le contrat de travail permet à tout salarié de bénéficier de droits collectifs qu’il n’aurait jamais pu acquérir seul, dans le cadre d’un contrat commercial.

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2016 : Le Projet de Loi El Khomri (PDL) remet en cause les bases mêmes du droit du travail. Le PDL met fin à l’autonomie des droits des salariés face aux intérêts des employeurs. L’intitulé du PDL exprime très explicitement la fin de cette autonomie : « nouvelles libertés et nouvelles protection pour les entreprises et les actifs ». Le mot « salariés » n’est même plus employé et – l’ordre des mots est important – la protection des entreprises passe avant celles des humains (les « actifs »). L’article 1 (Page 1) du PDL affirme que les droits fondamentaux des personnes sont limités « par les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise » Le PDL remet en cause le lien de subordination qui justifie l’existence d’un Code du travail protecteur des droits des salariés. Le Medef qui nie l’existence du lien de subordination et considère qu’il s’agit d’une « soumission librement consentie », ne justifiant aucune contrepartie en terme de code du travail, voit ses exigences reprises par le PDL. Le PDL reprend, ainsi, à plusieurs reprises (convention individuelle de forfait, travail de nuit…) la notion de volontariat d’un salarié dans l’entreprise. Il faut vraiment n’avoir jamais travaillé dans une entreprise privée pour ne pas savoir que cette notion de volontariat n’a, en un tel lieu, strictement aucun sens. Manuel Valls parle d’un droit du travail du XXIème siècle, alors le PDL organise un retour au droit du XIXème siècle. C’est la 1ère raison pour laquelle le PDL ne peut pas être amendé. Il doit être retiré.

La 2ème régression majeure : la fin de la hiérarchie des normes et a fin du « principe de faveur ». Avec le PDL, l’accord d’entreprise devient le centre du droit du travail. Ce n’est pas un hasard. L’entreprise est le lieu où le rapport de forces est le moins favorable aux salariés, d’autant plus que la taille de l’entreprise ou de l’établissement (une subdivision de l’entreprise) est moins importante. C’est là où le chantage à l’emploi est le plus efficace et, où, un révolver sur la tempe (la menace de licenciements immédiats ou futurs), les syndicats ont le plus de difficultés à refuser la signature d’un accord. Dans le projet de loi El Khomri, l’ordre public (imposable à toutes les entreprises) est réduit à des généralités. La négociation collective, dont le champ est très vaste, soumet l’accord de branche à l’accord d’entreprise selon la formule reprise presqu’à chaque page : « Un accord d’entreprise, ou, à défaut, un accord de branche… » Le contrat de travail n’apporte plus aucune garantie. Un salarié ne pourra plus refuser la modification de son contrat de travail (durée et organisation du temps de travail, montant du salaire) si un accord d’entreprise augmente la durée du temps de travail et diminue son salaire horaire. S’il refuse, il pourra être licencié pour faute !

C’est la 2ème raison pour laquelle le PDL ne peut être amendé et doit faire l’objet d’un retrait. A cela s’ajoutent de multiples reculs apportés au code du travail qui nous font revenir des décennies en arrière, avec l’augmentation de la durée maximale de travail, la minoration des heures supplémentaires, des licenciements facilités, la réduction du rôle de l’inspecteur du travail ou de la médecine du travail…

Ces différentes attaques sont toutes plus réactionnaires les unes que les autres, le projet de loi El Khomri est un véritable projet de loi réactionnaire qui vise à détruire les protections collectives des salarié-e-s. Alors, nous aussi, activons nos mémoires, et construisons les mobilisations sociales qui, grâce à des grèves générales reconductibles, par l’auto-organisation des jeunes et des salarié-e-s ont toujours permis de faire reculer les gouvernements réactionnaires et d’obtenir de vrais acquis sociaux, comme avec le CPE, il y a 10 ans, le mouvement de 1995 contre le plan Juppé, voire les grèves générales de 1968, 1945 ou 1936.

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