Réforme des STI

Prolongement de la réforme du lycée, la nouvelle filière STI2D doit être rejetée
vendredi 4 février 2011
par  Sud Education Lorraine

Un article à lire dans le bulletin n°6 de SUD Education Lorraine.

Après avoir divisé par deux l’horaire d’enseignements technologiques en classe de Seconde, la réforme Chatel impose, dès la rentrée 2011, l’unique filière STI2D (Sciences et techniques pour l’industrie et le développement durable) en remplacement des très nombreuses filières STI (Sciences et technologies industrielles). Dans les textes des programmes, on observe que les enseignements technologiques industriels sont abandonnés au profit d’une formation plus scientifique et dématérialisée et de manière concomitante, que la prise en charge des élèves se dégrade. Mais, peu importe, le Ministère qui feint de n’avoir d’objectif que " l’Excellence" de la formation des élèves, est en fait seulement préoccupé par les suppressions de postes d’enseignants.

Les élèves seront les premières victimes de la réforme STI2D

Jusqu’à présent, les filières STI, qui donnaient une spécialisation dans un domaine technologique particulier, assuraient, à terme, la réussite d’élèves dans un segment professionnel intermédiaire entre exécutant et ingénieur.
Quels sont les contenus de la réforme et quelles seront les conséquences pour les élèves ?

Les contenus du programme d’enseignement se veulent plus ambitieux, ils ne sont plus en adéquation avec le projet de formation de l’élève type qui entrait jusqu’alors en filière STI :
- la mise en place d’un tronc commun d’« enseignements transversaux » traitant de mécanique, électrotechnique, informatique industrielle et génie civil, le tout dans l’optique du Développement durable, écrasera l’élève sous les connaissances ; la réduction du volume horaire consacré aux enseignements technologique dans le cycle terminal (- 29,5% en 1e et - 24% en Tale) entrainera un saupoudrage de connaissances et rendra impossible tout approfondissement.
- Les travaux sur maquettes instrumentées et avec des logiciels de simulation ne pourront remplacer les travaux pratiques d’atelier sur machines industrielles qui montraient à l’élève la réalité du monde technologique. Le recours récurrent aux TICE, cartes mentales et autres, présentées comme outil indispensable à la formation, achèvera de plonger l’élève dans un monde virtuel.
- La poursuite d’étude en STS ou IUT est compromise : en raison des contenus de la STI2D, si polyvalents, l’élève sera en situation de partir (presque) de zéro dans le domaine de la technologie industrielle, d’où des difficultés supplémentaires pour le jeune étudiant.
- L’élévation des contenus des programmes de STI2D et leur rapprochement de ceux de S-SI, dans le but de préparer maintenant les élèves à l’enseignement supérieur long, accentuera le clivage avec le BAC PRO qui deviendra l’unique voie réellement industrielle en lycée.

L’effectif à maxima des classes en tronc commun -jusqu’à 35 élèves- et heures de dédoublement contingentées par le volant d’heures "globalisées" dégraderont considérablement les conditions d’apprentissage.

Possibilité, pour l’élève de 1ère, de « changer de trajectoire » grâce à la « polyvalence » de la formation technologique :
- spécialisation effectivement repoussée d’un an, en classe de Terminale : temps perdu pour l’élève motivé et "zapping" légalisé pour l’élève en situation de difficulté, … conséquences prévisibles sur l’ambiance de travail dans la classe … 
- stages de « remise à niveau » non garantis car soumis au volontariat des élèves et des professeurs (moyens en HSE par ailleurs limités) : parodie de prise en charge de l’élève et illusion de solution pour les parents.

La carence du dispositif de reconversion des professeurs (voir également ci-dessous) conduira à un niveau de qualification professionnelle médiocre en raison de contenus et de nouvelles pratiques pédagogiques insuffisamment maîtrisés : l’élève recevra un enseignement approximatif.

Peu importent les élèves, il faut seulement réaliser des économies budgétaires

Pour le gouvernement, la réforme doit générer des suppressions de postes.
Prétextant la nécessité d’une formation pluritechnogique pour les élèves, le ministère exige aujourd’hui que les quelques 7000 enseignants spécialistes de STI se reconvertissent en professeurs polyvalents. Cette reconversion, qui vise une gestion plus souple des personnels, génère un bouleversement de leur métier. L’exigence de mobilité et l’apparition d’une souffrance au travail consacrent la précarisation des personnels d’enseignement.
Quels sont les éléments de cette réforme qui permettent de confirmer ces sombres perspectives :

Une suppression massive de postes fixes directement liée :
- à la réduction de l’offre de formation : de douze STI, on passe à une STI2D avec 4 « spécialités » ;
- à la réduction horaire hebdomadaire élève, notamment dans le domaine technologique (-25 à -30% env.) ;
- à la diminution globale du volant d’heures pour cours "à effectif réduit" ;

Le nouveau profil de compétences du professeur en STI2D voulu par le Ministère entraine une reconversion de tous les profs du domaine des Génies industriels et civil : le dispositif de formation de plusieurs centaines d’heures, et d’un type nouveau (principalement par auto-formation par internet) ne manquera pas de rebuter nombre de collègues.
Avec la création de la STI2D il est probable que de 20 à 40% des postes auront été supprimés à la rentrée 2012. On comprend alors pourquoi le ministère envisage clairement la reconversion dans une autres discipline que STI2D (math, technologie collège, etc.) ou même la sortie de l’Éducation Nationale des personnels enseignants.

La décision ministérielle de supprimer la spécialité "Physique appliquée" (enseignement des sciences physiques à 90% en électrotechnique) et la décision brutale de transférer tous les professeurs de cette spécialité dans le corps des professeurs de Physique-Chimie ne fait l’objet d’aucun plan d’accompagnement des professeurs, juste un changement d’intitulé.

La mise en œuvre de la réforme à la rentrée 2011 plonge dans l’inquiétude nombre d’enseignants : comment transmettre correctement des connaissances à peine acquises et assumer sans difficultés de nouvelles pratiques pédagogiques ?

La possibilité d’ouverture de sections STI2D dans tout type de lycée entraîne, mécaniquement, un accroissement de la mobilité demandée aux "nouveaux" professeurs d’enseignement technologique en STI2D.

L’évolution du métier d’enseignant STI est plus que jamais incertaine : devenus « généralistes » en technologie, les professeurs TZR pourront être nommés :
- sur tout poste de discipline « connexe » : qu’englobera ce terme ?
- dans tout établissement, lycée, collège ou LP (?) et sur zone géographique défini au bon vouloir du rectorat. Le nouveau décret sur le licenciement des professeurs après trois refus de postes est susceptible de conduire les profs à accepter n’importe quel type de nomination.

Le corps d’inspection a reçu des recommandations pour faire passer la réforme, parmi lesquelles « combattre la sinistrose » des professeurs, preuve s’il en était besoin, que le Ministère n’ignore rien de la brutalité des dispositions de sa réforme.

Et maintenant ?

SUD Éducation entend d’abord combattre la réforme en interpellant l’Institution sur le plan juridique : le dispositif de reconversion des professeurs, pilier de cette réforme, ne semble aucunement prendre en compte les textes régissant la formation professionnelle des fonctionnaires. Et pour cause. En raison de l’extraordinaire multiplicité des contenus et de leur niveau d’accès élevé, le volume horaire réel qu’exige cette formation est absolument colossal !

Alors qu’il entend mettre en œuvre la réforme à la rentrée 2011, le ministère compte sur la loyauté et la résignation des collègues pour obtenir leur collaboration … En tout état de cause, quel que soit le degré de mobilisation des enseignants dans le dispositif et même s’ils se forment superficiellement, vu du ministère, il ne faut pas laisser la place aux critiques et il faut aller vite. Cela est inadmissible.

SUD Éducation propose donc que les enseignants STI de chaque établissement se réunissent en AG et votent l’envoi d’une lettre ouverte au recteur, lui demandant de préciser en quoi le dispositif de formation est bien conforme aux textes régissant la formation professionnelle des fonctionnaires.

De manière concomitante, les personnels doivent partout se mobiliser et dire leur désaccord profond avec cette pseudo-réforme qui aura des effets dévastateurs sur la formation des élèves et dont le but final est la précarisation, sinon la liquidation, des professeurs de STI.


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